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Carnet de voyage numéro 1 : En vol avec les Snowbirds. 05/01/2016

 

Un livre photo. sur les patrouilles accrobatiques de tous les continents sera publié en 2017.

Retrouvez dans cette rubrique «  Chroniques », les anecdotes vécues par l’auteur à travers  ses Carnets de voyages, le « making off » de cet ouvrage aux images spectaculaires.

 

Carnet de voyage numéro 1 : créer des images en vol avec les Snowbirds

Cap sur l’Ile de Vancouver, en Colombie Britannique. 18 avril 2016. J’atterris sur l’aéroport de Comox dans un Boeing de la Westjet, à la tombée de la nuit, au bout d’une journée de voyage en venant de France. Dans la pénombre, je reconnais par le hublot, les silhouettes des 11 Canadair CT-114 Tutor des Snowbirds, patrouille nationale de la Royal Canadian Air Force depuis  1971. Ils sont bien loin de Moose Jaw, leur base d’attache, dans le Saskatchewan ... Ici, sur le tarmac de la base militaire du 19 Wing– partagée avec le petit aérogare civil où mon 737 vient stationner, ils semblent insignifiants devant les hangars géants, autrefois occupés par les CF-100 et CF-101, désormais adoptés par les Aurora de patrouille maritime, les DH Canada Buffalo, et les nouveaux Westland Cormoran du secours aérien. J’aperçois enfin les deux Boeing McDD CF-18 Hornet de l’équipe de démonstration « solo » de la RCAF. Je me souviens qu’il y a quatre ans j’avais volé ici, dans le biplace. Le temps de quelques semaines, en avril de chaque année, les Hornets et les Snowbirds sont regroupés à Comox, en campagne d’entraînement, comme une seule « Task Force » destinée aux shows aériens. Deux vols quotidiens sont programmés pour chacune des deux équipes, dont un au-dessus de la mer qui longe l’aérodrome. Ce qui me frappe, puisque j’avais déjà survolé les lieux en Hornet, c’est la majesté du panorama. L’aérodrome de Comox est bordé par la mer sur ses flancs sud et est. Il est longé par la chaine de montagnes enneigées sur l’ouest, caractéristiques du paysage local de lacs et de glaciers. Jadis, ici, c’était bien le paradis des indiens. Ils ont laissé à l’île leur totems, de nombreux héritiers, et la pratique de la chasse et de la pêche dans ce «  comox » qui en indien, signifie «  lieu d’abondance ». Ces « First Nations » ont légué aux « blancs », venus s’installer ici, dans le sillage du Capitaine Cook, la pêche au saumon. Les plus grands saumons mesurent plus d’un mètre, et se nomme « Chinooks », comme le fameux hélicoptère birotors… Cette île me plait pour ses paysages escarpés qui semblent avoir été installés ici, exprès pour y faire de la photo aérienne.

 

Mais tout cela se planifie astucieusement, le lendemain. D’une part, pour être apte  à voler à bord d’un CT-114 Tutor, je passe une brève visite médicale sur l’hôpital de la base, suivie d’un après-midi d’entraînement au cours duquel on m’apprend à m’équiper de mon parachute, par-dessus ma combinaison de vol (perso), puis à me sangler sur un siège éjectable (dont la technologie remonte aux années 60, d’où l’aspect un peu vintage de l’expérience). Une petite heure à apprendre par cœur, sangles et poignées diverses, en particulier celles sur lesquelles je ne devrais pas tirer, lorsque j’aurai armé mon siège, c'est-à-dire une fois que j’aurai retiré son pin de sécurité, le lendemain quand l’avion quittera le parking. En cas de pépin en vol, le pilote annoncera « prepare to eject » pour que je « balance » mon Nikon D4 sous le pare-brise, et que je replie mes genoux, puis trois fois « eject » pour m’ordonner de tirer sur les deux poignées latérales, pour enfin, vivre dans une atmosphère assez « sportive » en encaissant 12 G pendant l’éjection. Et puis il faut se souvenir de la petite poignée jaune en dessous du siège : une fois hors de l’avion, il faut tirer dessus pour actionner l’équipement de sauvetage. Ne vous inquiétez pas, car si le parachute ne s’ouvre pas, mes amis de la RCAF m’ont bien montré sur quelle autre poignée il faudra alors, «  tirer », et je sais aussi, comment atterrir dans les arbres ou amerrir dans le Pacifique.

 

Trêve de petits amusements techniques, la partie plus « esthétique » - à proprement parler - du voyage, va pouvoir commencer. Car je passe une partie de la soirée, à dessiner les images que je souhaiterais faire «  dans le meilleur des mondes »…, en tenant compte à la fois des formations typiques de l’équipe vues au cours des vols de la journée, et des paysages que nous serions censés survoler. Je reviens donc le lendemain matin, 20 avril, en salle d’opérations des équipes Snowbirds et Hornet. Pour résumer, depuis la veille, j’ai assisté à plusieurs briefings des 9 pilotes des Snowbirds. J’ai aussi observé quel types de formations ils réalisent ensemble, en les observant évoluer. Heureusement que j’avais dessiné tout ce qui me plaisait en soirée, car déjà, mon pilote, le très professionnel Brent, vient me voir pour dégrossir les dessins et me dire ce que nous pourrons faire ou ce qui est totalement illusoire. Il est vrai que je n’ai pas l’intention de passer pour un «  charlot » auprès des membres de la patrouille, en leur présentant des « vues d’artistes ». Brent annote les noms des figures proposées sur mes dessins, notamment en « pieds » pour choisir des altitudes (évidemment) acceptables, et en me demandant de préciser la nature des formations, aidé de son « booklet » des figures officielles des Snowbirds. Je suis stupéfait : quel honneur, d’avoir à choisir les formations à photographier  dans son petit livre! En soirée, le Commandant Yannick Grégoire, leader des Snowbirds, vient me voir pour me demander « alors quelles sont les photos que je souhaiterais faire »: « so what pictures would you like to do ? ». Impressionné par sa disponibilité, je lui présente à ma manière, les petits croquis corrigés avec Brent, dans un langage de photographe presque incompréhensible pour lui, mais aidés de mes deux mains, ces indispensables outils d’expression internationale pour pilotes de chasse, que j’apprends à utiliser avec une facilité déconcertante, par la nécessité de communiquer, afin d’avoir la satisfaction de rentrer chez moi dans trois jours, avec de bonnes images.

Tout est au point, mais bien sûr, le 21, c’est le jour du vol, et il fait une dizaine de degrés avec un temps très couvert. (Il est loin le soleil de Bahrain de janvier dernier). Je me suis rendu compte, que depuis que je fais de la photo d’aviation, je me mets à croire en Dieu, pour tout ce qui concerne la météo. Commence le briefing. Le vol durera 40 minutes, car les 20 premières minutes sont consacrées par la patouille, à suivre un Buffalo rempli de photographes, la soute ouverte, sur un vol rectiligne. Ensuite le reste du temps de vol est attribué aux prises de vues prévues, entre les équipages et moi, et je mesurerai pendant très longtemps, l’honneur qui m’aura été fait par les Snowbirds ce jour du 21 avril 2016. Dans le déroulé du briefing, j’entends Yannick citer à ses coéquipiers les quatre figures que nous avions convenu de faire, dont un éclatement des solos, un moment suffisamment délicat à photographier, pour que je continue à prier pour que le soleil revienne au moins pour cet instant-là. Pendant le temps du briefing d’ai bien vérifié une dernière fois la configuration et les réglages personnels que j’ai attribués à mon Nikon D4. Il existe autant de « checklists » en photographie qu’en pilotage. Car ce n’est pas une fois en vol, qu’il faudra se rendre compte de quelque chose d’oublié : ce serait trop tard. C’est aussi l’instant où j’évacue de mes poches le moindre accessoire. Jamais de carte mémoire supplémentaire, ni de pare soleil, rien qui ne puisse tomber dans la cabine, et mettre en péril le vol. La photo en vol se fait à l’ancienne, un boitier avec un objectif vissé dessus, rien dans les poches, et une seule chance de déclencher au bon moment, comme un cowboy. Alors commence le rituel de mon équipement en parachute, suivi de mon installation sur siège éjectable, dans le cockpit, et répété au sol, deux jours avant… Un mécano attitré à l’avion est là pour m’assister. Précision de taille, j’ai choisi la place de gauche, car mon œil directeur est celui de gauche : évidemment, j’avais calculé cette option 48 heures avant le vol. Là, Brent vient s’installer avec une rapidité déconcertante. On voit qu’il le fait tout les jours.

 

Les dix avions démarrent en ligne : un instant magique. La difficulté, c’est lorsque le casque sur la tête, avec le masque à oxygène installé, il faut s’entraîner à coller le viseur du Nikon à l’œil, et cadrer sans trop s’arracher le nez avec le masque. Ainsi, au roulage de l’avion, je répète pendant 5 minutes mon positionnement pour bien cadrer instantanément sans être perturbé ni par le casque, ni par cette vie de cockpit collée au siège qui ne permet pas de se mouvoir dans tous les sens. Pendant tout le vol, il faut gérer l’ergonomie, et l’avoir répétée avant de décoller. Contrairement à ce que j’ai connu dans le cockpit du F-18, je me rends compte qu’il n’y a que très peu d’angles possibles de prises de vues dans le Tutor. Mais on apprend toujours à faire avec l’avion que l’on a. Surtout à bord d’un jet mythique de l’histoire de l’aviation canadienne. Nous décollons, et Brent décide de faire un peu de radada sur les montagnes. Génial. Mes premières photos sont celles du paysage pour l’illustration web. Nous avons 20 minutes de vol, seuls avant d’être rejoints par la patrouille. La cabine baigne dans un incessant ballet de contacts radios. Brent est chargé d’avoir la liaison radio avec la patrouille et une communication séparée, sur une autre fréquence, avec moi, pour nous positionner à ma guise autour des Tutor, pendant toute la partie « photo » avec la formation. En les attendant, j’indique à Brent quelques reliefs qui commencent à être éclairés par le soleil, grâce à de rares trouées dans le plafond de nuages. Alors, nous allons tourner autour du Mont Washington dont la neige commence à scintiller. Nous allons être vite récompensés, car les Snowbirds que nous attendions, nous rejoignent ici, dans cet instant de lumière.

Les 9 Tutor longent ce cornet de glace et épousent la pente de la montagne, tel que je le souhaitais. Au cours des minutes qui vont suivre, nous allons survoler un lac, puis la mer et pas mal de reliefs. Le plus délicat, est le moment de la manoeuvre spéciale d’éclatement des deux « solos » pendant que les sept autres avions vont grimper derrière eux, dans une bonne profondeur de champs. Les deux «  solos » se positionnent parallèlement à mon avion, sur ma gauche. Hélas le soleil est en train de disparaître, mais Yannick Grégoire, leader, leur donne le top à la radio. En moins d’une seconde, j’ai cadré tout ce petit monde dans mon viseur d’une manière quasi instinctive, tel un archer, et expiré  lentement en déclenchant en rafale. C’est une séance de tir au pistolet, en quelque sorte. Mais ce n’est pas le Nikon D4 qui fait la photo : lui, ce n’est qu’un outil. Le photographe fait du tir à l’arc. Il fonctionne avec ergonomie, et beaucoup de pratique pour composer très vite instinctivement, et intuitivement son image, et enfin pour déclencher au bon instant. Rien d’autre que de l’entraînement, et de la préparation à réagir d’une manière précise et appropriée, en une fraction de secondes. Finalement, trêve de « grand soleil », nous aurons été « gâtés » par de micro rayonnements  lumineux frappant cet éclatement spécial. Cela dit, j’ai remarqué, qu’à la fin de la manoeuvre, le soleil avait complètement disparu. Oups ! La réussite des images s’est jouée sur très peu de choses en tout début d’éclatement. Une fois de plus, je me suis rendu compte que la production d’une poignée d’images uniques nécessite un investissement personnel - et quelquefois financier – pouvant atteindre des proportions gigantesques. Et ces efforts sont généralement plus payants en termes de qualité d’images obtenues, lors de ce genre de voyage aux antipodes. Ce qui explique aussi, en guise d’épilogue, pourquoi lors de la post production, j’aurai, au final, été plutôt satisfait des images obtenues pendant ce vol vintage. Les photos paraissent plutôt « enneigées », à la fois par la blancheur des montagnes, et par la teinte fantomatique du ciel de Colombie Britannique. Ce sont les couleurs emblématiques de Vancouver. Et après tout, les avions ne s’appellent-ils  pas les " Snow " birds ?

 
 
Note en guise d'épilogue : naturellement, la fameuse photo décrite dans ce récit, et réalisée pendant la manoeuvre spéciale, n'est pas publiée dans cette " Chronique ". Il faudra patienter jusqu'à l'édition du livre, courant 2017, pour avoir l'exclusivité de la découvrir, tout come les meilleures images de ce vol !
 
 
 
Huge special thanks to all Snowbirds pilots and groundrew.  I deserve special prize to Brent for his aerobatic maneuvers done just for me, to Yanick Grégoire, a great leader in the history of the team, Patricia Brunnelle, all guys on the air base, and Spike ! Watch more about the adventure in this web.magazine soon, and the book in 2017.
 

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